Adhésifs d'origine végétale

Des solutions collantes durables

1/31/20256 min read

Quand on pense aux adhésifs, on imagine souvent une bouteille de colle qui traîne dans un tiroir ou ces étiquettes autocollantes qui refusent de se décoller proprement. Mais saviez-vous que la nature perfectionne la technologie des adhésifs depuis des millions d’années ?

Du lierre grimpant aux plantes carnivores comme la droséra, les plantes sont les véritables experts en matière de colle naturelle. Aujourd'hui, leurs secrets collants ouvrent la voie à des adhésifs durables d'origine végétale.

Entrons dans le vif du sujet !

1. Rôle chez les plantes

Non, les plantes ne fabriquent pas de colle pour des projets de bricolage (même si ce serait génial). Leurs adhésifs sont essentiels pour leur survie (Lutz et al., 2022).

Le lierre (Hedera helix), par exemple, utilise une bio-colle à base de mucopolysaccharides pour s'accrocher aux murs et aux arbres, ce qui lui permet de grimper vers la lumière pour la photosynthèse.

Aloe vera - gel collant
Aloe vera - gel collant

L’Aloe vera (Aloe barbadensis Miller) produit un mucilage visqueux pour s’adapter à l’environnement. Ce gel a une très forte capacité de fixation de l'eau, permettant de se protéger de la déshydratation pendant les longues périodes de sécheresse. Il entre aussi dans la fabrication des films et des revêtements.

De même, les plantes carnivores comme la droséra (Drosera capensis) sécrètent un mucilage collant pour piéger des insectes imprudents. Cette colle végétale immobilise les proies tout en facilitant leur digestion, et tout cela, de manière écologique.

Un autre exemple fascinant est le gui, qui produit un adhésif à base de viscine pour s’ancrer aux arbres hôtes. Ce pouvoir collant garantit à ce parasite les nutriments dont il a besoin tout en restant fermement attaché malgré le vent et la pluie.

2. Adhésif biodégradable

Les adhésifs peuvent être d'origine synthétique ou naturelle, en fonction de leurs matériaux de base (Chen et al., 2018).

De nombreux adhésifs synthétiques sont des résines à base de formaldéhyde dérivées de produits pétrochimiques, notamment les résines phénol-formaldéhyde et urée-formaldéhyde. Malgré leur performance remarquable comme colle, notamment une excellente force d'adhérence, une résistance à l'environnement et une durabilité, leur nature non renouvelable et cancérigène pour l’homme les rend de moins en moins attractifs.

Les adhésifs naturels sont développés à partir de plantes, d'animaux et de microbes comme alternative renouvelable et écologique.

3. Comment sont fabriqué les adhésifs d’origine végétale ?

Les adhésifs naturels d’origine végétale reposent sur des composés tels que les polysaccharides, les tannins, les protéines et les glycoprotéines, auxquels sont ajoutés des charges, des pigments, des stabilisants, des plastifiants et d'autres additifs afin d'obtenir des colles organiques performantes (Chen et al., 2018 ; Lutz et al., 2022 ; Raydan et al., 2021).

1/ Les polysaccharides :

Ce sont de longues chaînes de molécules de sucre que les plantes produisent pour le stockage et la structure. Leur potentiel adhésif réside dans leur capacité à interagir avec l'eau et à former des gels. Parmi ces polysaccharides collants, on cite :

  • Amidon : Présent dans le maïs, les pommes de terre et le blé, l’amidon est l’un des adhésifs végétaux les plus couramment utilisés. Il forme des liaisons solides lorsqu’il est dissous dans l’eau et chauffé pour créer une structure gélatineuse.

  • Sucres des algues : Comme l'alginate ou l'acide alginique, la cellulose et les fucoïdanes.

  • Cellulose : Retrouvée dans les parois cellulaires des plantes, la cellulose peut être modifiée chimiquement (par exemple, carboxylée) pour créer des adhésifs plus résistants à l'eau.

  • Gommes : Mélanges complexes de polysaccharides et de glycoprotéines, elles sont souvent utilisées comme colle biologique, comme la gomme d'acacia (gomme arabique).

- Étapes de fabrication :

  1. Extraction : Les polysaccharides comme l’amidon ou la cellulose sont isolés de sources végétales (par exemple, broyage de maïs ou traitement de la pulpe de bois).

  2. Modification : Des traitements chimiques (ajout de groupes hydroxyles ou carboxyles) améliorent la résistance et la durabilité.

  3. Formulation : Les polysaccharides modifiés sont mélangés à d’autres biopolymères pour ajuster des propriétés telles que la flexibilité ou la vitesse de durcissement.

- Avantages :

  • Biodégradables et non toxiques.

  • Disponibles à partir de sous-produits agricoles.

  • Conviennent aux applications variées comme les adhésifs pour emballage ou les hydrogels biomédicaux.

- Limites :

  • Faible résistance à l'eau à l’état brut.

  • Durabilité limitée sous forte contrainte mécanique.

2/ Les protéines :

Composées d'acides aminés, elles possèdent des groupes fonctionnels (amines, carboxyles, thiols) capables de former des liaisons avec diverses surfaces. Différentes protéines sont utilisées, comme les protéines de soja, le gluten de blé, les graines de coton, le canola, la zéine (grain de maïs).

- Étapes de fabrication :

  1. Extraction : Les protéines sont isolées des plantes (soja, blé) par des procédés comme la centrifugation.

  2. Modification : Des traitements enzymatiques ou chimiques (par exemple, réticulation avec des tanins) améliorent la résistance à l'eau.

  3. Durcissement : Les adhésifs à base de protéines sont activés par la chaleur ou la pression.

- Avantages :

  • Excellente adhésion aux matériaux poreux comme le bois.

  • Respectueux de l’environnement.

  • Absence d’émissions nocives comme le formaldéhyde.

- Limites :

  • Sensibilité à l’eau en raison de leur nature hydrophile.

  • Modifications chimiques nécessaires pour répondre aux exigences industrielles.

3/ Les glycoprotéines :

Les glycoprotéines, mélange de protéines et de glucides, combinent les avantages des deux. Parmi les plantes produisant ces molécules collantes, on cite :

  • Lierre (Hedera helix) : Ses sécrétions adhésives lui permettent de grimper sur des surfaces verticales.

  • Droséra (Drosera spp.) : Son mucilage collant est élastique et efficace pour piéger des proies.

- Étapes de fabrication :

  1. Extraction : Les glycoprotéines sont collectées à partir de plantes sécrétant des mucilages.

  2. Concentration : Des techniques comme l’ultrafiltration permettent d’isoler les glycoprotéines.

  3. Formulation : Des stabilisants sont ajoutés pour améliorer la durabilité.

- Avantages :

  • Naturellement élastiques et solides.

  • Bonne adhérence à des surfaces variées comme le verre.

  • Biodégradables et sûrs pour l’environnement.

- Limites :

  • Production limitée et coûteuse.

  • Défis pour les rendre accessibles à grande échelle.

4. Applications industrielles des adhésifs naturels

Grâce à leur capacité de lier les matériaux, les adhésifs sont utilisés dans de nombreux secteur, y compris l'aérospatiale, l'automobile, l'électronique, la construction, la fabrication de meubles, la fabrication de tapis, la construction d'instruments de musique, l'emballage, la fabrication de contreplaqué, les textiles et l'agriculture (Chen et al., 2018).

Les adhésifs d’origine végétale sont prometteurs pour :

- Bois et construction (Raydan et al., 2021) : Les colles à base de soja, renouvelables et peu coûteuses, remplacent les adhésifs au formaldéhyde pour des meubles plus écologiques.

- Emballage : Les adhésifs à base d’amidon scellent efficacement les cartons.

- Applications biomédicales (Lutz et al., 2022) : Les adhésifs inclus dans les films, échafaudages 3D, hydrogel et nanofibres sont utilisés pour la cicatrisation des plaies ou les sutures chirurgicales.

5. Défis et perspectives

Malgré leurs avantages, ces adhésifs rencontrent des défis, comme la faible résistance à l’eau et les coûts élevés de production. Cependant, les avancées en biotechnologie promettent de surmonter ces obstacles et d’améliorer leurs performances, tout en maintenant leur essence écologique.

Sources :

Article de synthèse : Lutz, T. M., Kimna, C., Casini, A. & Lieleg, O. (2022). Bio-based and bio-inspired adhesives from animals and plants for biomedical applications. Materials Today Bio, 13, 100203.

Article de synthèse : Raydan, N. D. V., Leroyer, L., Charrier, B. & Robles, E. (2021). Recent Advances on the Development of Protein-Based Adhesives for Wood Composite Materials—A Review. Molecules, 26(24), 7617.

Livre : Chen, G., Weselake, R.J. & Singer, S.D. (2018), Plant Bioproducts, Springer :