Bio-herbicides à base de plantes
Dans l’agriculture, il est important de gérer les contraintes biotiques des cultures, telles que les mauvaises herbes, les insectes et les microorganismes pathogènes causant les maladies.
De multiples méthodes sont utilisées pour lutter contre les mauvaises herbes, comme les méthodes culturales, physiques, mécaniques, biologiques et chimiques. Les herbicides chimiques sont une méthode simple et économique et donc largement utilisée par les agriculteurs. Cependant, le développement de résistance par les mauvaises herbes, comme Conyza sumatrensis (Vergerette de Sumatra ou Vergerette blanchâtre), et les effets négatifs sur l’environnement, les animaux et les humains ont poussé à la recherche d’alternative plus naturelle.
Les plantes répondent à la présence de menace par la synthèse de métabolites secondaires. Ces derniers ont un effet herbicide et peuvent être utilisés pour éradiquer les mauvaises herbes. Elles sont utilisées comme culture de couverture (comme les céréales et les légumineuses) ou comme bio-herbicide.
Les recherches ont investi l’efficacité des bio-herbicides issus des plantes, des bactéries, des champignons et d'autres produits pour lutter contre les mauvaises herbes.
1. Potentiel herbicide des plantes
Dans le cadre de l’agriculture durable, les intrants chimiques sont remplacés par des alternatives naturelles. Les bio-herbicides présentent plusieurs avantages, comme leur effet spécifique sur la cible et faible nombre de cas de résistance, leur faible effet secondaire sur les organismes non ciblés, leur dégradation rapide dans l'environnement et l’absence de résidus dans le sol.
L'action des bio-herbicides reposent sur le dérèglement de l’absorption des nutriments, de la photosynthèse et de la perméabilité membranaire, sur l'altération du métabolisme des protéines et sur la réduction de la synthèse des pigments photosynthétiques (caroténoïdes), augmentant ainsi la photo-oxydation.
Le potentiel herbicide des plantes se base sur l’inhibition de la germination et la croissance des mauvaises herbes. Les extraits des plantes induisent des changements anatomiques, des dommages à l'ADN, à certains processus biochimiques, à la mitose et aux cellules méristématiques dans la croissance des semis. Parmi les plantes ayant montré un effet herbicide, on cite :
Les huiles essentielles ont aussi un effet herbicide. Elles réduisent la teneur en protéines et en chlorophylle (et donc la photosynthèse), causent des changements dans le cycle cellulaire, des dommages aux chromosomes et inhibent la germination et le développement des mauvaises herbes.
Les huiles essentielles de clou de girofle, de thym, de verveine des Indes, de pin, d'orange, de citronnelle et d'eucalyptus sont les ingrédients les plus courants dans les formulations commerciales d'herbicides biologiques. D’autres huiles essentielles et leurs composés (citral, carvacrol et thymol) sont étudiés pour lutter contre les mauvaises herbes, comme les huiles essentielles de :
Corymbia citriodora (eucalyptus citronné) ;
Cymbopogon nardus (citronnelle de Ceylan) ;
Origanum acutidens (origan) ;
Descurainia sophia (herbe de sainte Sophie ou sagesse des chirurgiens) ;
Lippia menosides ;
Dodonaea viscosa (dodonée visqueuse) ;
Coleus amboinicus (gros thym, menthe indienne, origan cubain ou oreille).
Les plantes produisent des substances allélochimiques et allélopathiques affectant la croissance, la survie et la reproduction d'autres organismes afin de se défendre et de survivre. Les substances allélochimiques affectent de nombreux organismes (microbes, animaux, plantes) alors que les allélopathiques affectent spécifiquement les plantes.
Les substances allélopathiques endommagent les membranes cellulaires, les protéines et l'ADN des mauvaises herbes, alors que les substances allélochimiques (comme les coumarines, les azulènes, les saponines et les dépsides) inhibent la croissance des racines.
Parmi les substances synthétisées par les plantes montrant une activité herbicide, on trouve les composés phénoliques (comme le thymol et le carvacrol). Ces derniers ralentissent la germination des graines et affectent la synthèse des hormones végétales, initiant la sénescence et réduisant la photosynthèse et la croissance des mauvaises herbes.
Les molécules appartenant aux classes des lactones sesquiterpéniques, des diterpènes et des flavonoïdes ont montré un effet herbicide. Les composés de Helianthus annuus L. var. Arianna, l'héliannuol A et la leptocarpine, ont montré un effet similaire aux herbicides commerciaux. Le polygodial, un sesquiterpène dialdéhyde, a aussi montré un effet herbicide.
Les plantes et les champignons produisent des phytotoxines naturelles présentant une alternative à l'utilisation d'herbicides synthétiques. Elles sont biodégradables, plus sûrs pour les organismes non ciblés et ont divers sites d'action.
Les champignons phytopathogènes sont très étudiés comme bio-herbicides, grâce à leur capacité de pénétrer dans les feuilles, de désintégrer leur structure cellulaire et d'induire la production de lésions nécrotiques ou d'auréoles chlorotiques. Parmi les champignons utilisés, on cite les espèces de Phoma, de Fusarium et Trichoderma koningiopsis.
2. Herbicides naturels commercialisés
Les premiers bio-herbicides ont été mis au marché en 1980 aux États-Unis, au Canada, en Ukraine et en Europe.
Parmi les herbicides naturels à base de plantes, des huiles essentielles, des champignons et des molécules isolées disponibles dans le marché, on trouve :
Avenger Organic Weed Killer®, à base de d-Limonène et huile de ricin ;
Organic Interceptor®, à base d’huile de pin ;
NatureCur®, à base d'extrait de noix noire ;
Biosedge®, à base du champignon Puccinia canalicuta ;
GreenMatch EX®, à base d’huile de verveine des Indes ;
Beloukha®, à base des composés de l'huile de colza, l’acide nonanoïque et l’acide pélargonique.
En conclusion, les plantes peuvent être utilisées dans l'agriculture comme bio-herbicide, présentant une solution naturelle et durable.
Source :
Article de synthèse : de Souza Barros, V. M., Pedrosa, J. L. F., Gonçalves, D. R., Medeiros, F. C. L. de, Carvalho, G. R., Gonçalves, A. H. & Teixeira, P. V. V. Q. (2021). Herbicides of biological origin: a review. Journal of Horticultural Science and Biotechnology, 96(3), 288–296.
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