Traitement du cancer par les plantes

1/3/202511 min read

Le cancer est l'une des principales maladies à l'origine de la majorité des décès, dépassant même les maladies cardiaques. Le cancer regroupe une centaine de maladies, pouvant toucher tout le monde, avec une augmentation de sa fréquence avec l’âge (Hassan, 2019).

Le traitement du cancer est généralement basé sur la chimiothérapie, la radiothérapie et la chirurgie. Ce traitement engendre des effets secondaires qui altèrent la vie des malades, dont les nausées, les vomissements et la perte de cheveux.

La recherche de meilleur traitement continue de progresser, avec un intérêt croissant pour les plantes médicinales comme source de molécules naturelles. L’intérêt est accentué par l’envie des patients de se tourner vers les thérapies complémentaires pour traiter le cancer.

Les champignons médicinaux, l’alimentation saine et riche en chlorophylle et d’autres molécules bioactives, les huiles essentielles et les huiles bioactives jouent aussi un rôle important dans le traitement et la prévention du cancer.

1. Comprendre le cancer

Le cancer est une maladie complexe, due à une prolifération (division) incontrôlée de cellules dans les tissus formant une tumeur (maligne ou bénigne) qui peut s'étendre à un organe entier ou à d'autres tissus (métastases). Ainsi, les cellules cancéreuses, montrant des altérations sur tous les niveaux, ne sont plus contrôlées par l’organisme. Le cancer peut être dû à des gènes héréditaires ou à une altération épigénétique de gènes clés (oncogènes) liés au cycle cellulaire et à la régulation de la mort cellulaire (apoptose) (Garcia-Oliveira et al., 2021).

Le cancer regroupe une centaine de maladies, dont les plus importants et répandus sont le cancer du sein, du poumon, colorectal, de l'estomac et du foie (George et al., 2021).

Le traitement du cancer par chimiothérapie est toxique sur les cellules cancéreuses et normales. En conséquence, plusieurs effets secondaires apparaissent, qui vont du légers au graves. Parmi les plus fréquents, on trouve les nausées et les vomissements, l'anémie, la perte de cheveux, les saignements, la thrombocytopénie, l'hyperuricémie, la dépression de la moelle osseuse, l'alopécie et la mucosite. En plus, l’apparition de la résistance à la chimiothérapie est un problème grave nécessitant le recherche de nouvelles alternatives (Hassan, 2019).

Les plantes sont une source de remèdes naturels contre le cancer, permettant de traiter, d’atténuer les effets secondaires dû aux traitements conventionnels et de prévenir le développement du cancer.

Leur puissance thérapeutique réside dans leur composition chimique complexe, permettant d’avoir différents mécanismes d’action, limitant la probabilité de développer une résistance par les cellules cancéreuses (Huang et al., 2021).

2. Plantes médicinales anticancer

Dans le monde des plantes, plusieurs espèces ont le potentiel de traiter ou prévenir le cancer.

A titre d’exemple, on trouve :

Curcuma longa (Curcuma) (Sultana et al., 2021)

Appartenant à la famille des Zingiberaceae (gingembre), cette plante est très utilisée comme épice dans les aliments, conservateur et colorant. Le curcuma est un remède naturel contre plusieurs maladies, grâce à ses effets antimicrobiens, antiviraux, antioxydants, digestifs, anti-inflammatoires, analgésiques et antiparasitaires.

Son potentiel thérapeutique est exploité pour la conception des traitements contre les maladies cardiovasculaires, le diabète, la maladie d'Alzheimer, l'arthrite, les affections hépatiques et rénales.

Son activité anticancéreuse est attribuée à ses composés chimiques, spécialement la curcumine, ayant un effet sur plusieurs types de cancers : la leucémie, les cancers génito-urinaires, gastro-intestinaux, le cancer du sein, des poumons, etc.

Curcuma longa - Curcuma
Curcuma longa - Curcuma

Source : van Wyk et Wink (2017)

Panax ginseng (Ginseng) (Kim et al., 2021)

Appartenant à la famille des Araliaceae, c’est une des herbes médicinales les plus utilisées en Asie.

Cette plante contient des molécules spéciales, appelées ginsénosides, propres aux espèces de ginseng. Ces saponines de type stéroïde sont efficaces dans le traitement des maladies cardiovasculaires, neurodégénératives et dans le cancer, spécialement le cancer du poumon, du sein, du côlon, de la prostate et de l'estomac.

Panax ginseng - Ginseng
Panax ginseng - Ginseng

Source : van Wyk et Wink (2017)

Camellia sinensis (Thé vert) (Singh et al., 2024)

Appartenant à la famille des Theaceae, cette plante (feuille) est utilisée pour préparer le thé, la boisson la plus consommée au monde.

Sa composition riche en polyphénols, spécialement les catéchines comme l'épigallocatéchine-3-gallate, lui confère plusieurs potentiels pharmacologiques contre les maladies cardiovasculaires, neurodégénératives, les troubles du foie et le diabète de type 2. Contre le cancer, la plante est très utilisée contre le cancer du sein.

Camellia sinensis - Thé vert
Camellia sinensis - Thé vert

Silybum marianum (Chardon-Marie) (Emadi et al., 2022)

Appartenant à la famille des Asteraceae, il est consommé comme légume dans les salades en Europe, et les graines sont utilisées chez les mères qui allaitent comme galactagogue (favorise la production de lait maternel).

Traditionnellement, la plante est très utilisée dans le traitement des rhumatismes, des troubles cardiaques, gastronomiques, rénaux, hépatiques et des maladies liées à la vésicule biliaire tels que l'hépatite, la jaunisse et la cirrhose.

Le chardon-marie et son composé la silymarine sont aussi utilisés comme agents hépatoprotecteurs et comme traitements complémentaires pour les cancers de la peau, de la prostate et du côlon. Ils sont aussi bénéfiques pour le traitement des effets secondaires des chimiothérapies anticancéreuses.

Silybum marianum - Chardon-Marie
Silybum marianum - Chardon-Marie

Source : van Wyk et Wink (2017)

3. Phytothérapie et cancer

3.1. Traitements commercialisés

Plusieurs molécules naturelles (d’origine végétale, bactérienne ou marine) ont été étudiées in vitro et in vivo afin de développer des traitements du cancer.

Parmi ces molécules, la camptothécine et le taxol sont les composés d’origine végétale les plus réussis, tous deux identifiés entre 1950 et 1960 (Huang et al., 2021) :

  • La camptothécine, isolée du bois et de l'écorce de Camptotheca acuminata (Arbre du bonheur), a aussi deux analogues, le topotécan et l'irinotécan, approuvés pour le traitement des cancers de l'ovaire, du poumon, du sein et du côlon.

  • Le taxol (paclitaxel), isolé en premier de l'écorce de Taxus brevifolia (If de l'Ouest), est un taxane présents dans plusieurs espèces du genre des conifères Taxus (If).

Depuis, plusieurs molécules ont été isolées et étudiées (Garcia-Oliveira et al., 2021) :

- Les alcaloïdes de Vinca sont un groupe d'environ 130 alcaloïdes indoliques terpénoïdes, présents naturellement dans les feuilles de Catharanthus roseus (Pervenche de Madagascar). Ils ont été parmi les premières molécules utilisées pour le développement de médicaments anticancéreux. Actuellement, plusieurs vinca-alcaloïdes sont utilisés en clinique pour le traitement du cancer : la vinblastine, la vincristine et des dérivés semi-synthétiques, tels que la vinorelbine, la vindésine ou la vinflunine.

- La podophyllotoxine est un important produit naturel d'origine végétale isolé à partir de Podophyllum peltatum (Podophylle pelté) et Podophyllum emodi (Aindri). Ses dérivés - l'étoposide, le téniposide et le phosphate d'étoposide – sont les agents anticancéreux les plus prescrits dans le monde.

- La roscovitine (nom générique Seliciclib) est un composé anticancéreux à base de purine, isolé à partir des cotylédons de Raphanus sativus (Radis commun).

3.2. Traitements futurs évalués

Une large gamme de phyto-molécules anti-cancéreuses sont évaluées dans des essais cliniques (Garcia-Oliveira et al., 2021) :

- La colchicine et ses dérivés : C’est un alcaloïde naturel isolé à partir de plantes du genre Colchicum, comme Colchicum autumnale (Colchique d'automne), mais existe aussi dans d’autres genres, comme Gloriosa et Sandersonia. Les études sur son utilisation comme anticancer montrent quelques limites, dont sa toxicité vers les cellules saines, d’où la synthèse des dérivés comme la colchicinamide, désacétylcolchicine et valylcolchicine.

- Le sulforaphane (1-isothiocyanate-4-méthyl-sulfinylbutane) : C’est le composé le plus connu du groupe des isothiocyanates, isolé à partir des feuilles de Lepidium draba (Passerage drave). On le trouve aussi dans les plantes de la famille des Brassicaceae (Crucifères) comme les germes de brocoli.

- Les composés phénoliques : C’est un groupe vaste de composés, ayant le potentiel d’interférer avec l'initiation, la croissance et la progression du cancer. Quelques exemples étudiés cliniquement sont:

  • Resvératrol : présent dans certains fruits, tels que le raisin, les cacahuètes, les myrtilles et les mûres ;

  • Curcumine : présent surtout dans Curcuma longa (Curcuma) ;

  • Quercétine : flavonoïde présent dans les baies, les oignons et les légumes à feuilles ;

  • Gingérol : présent dans le rhizome de Zingiber officinale (Gingembre) ;

  • Kaempférol : flavonoïdes très courant, présent dans divers fruits et légumes.

Il existe aussi d’autres composés isolés de plantes comme Aloe vera (émodine), Crocus sativus ou Safran (safranal, crocine, crocétine), Ginkgo biloba ou Ginkgo (ginkgétine, isoginkgétine, bilobétine), Matricaria chamomilla ou Camomille (apigénine, chamomillol).

4. Plantes pour atténuer les effets secondaires du cancer

Les huiles essentielles sont utilisées afin de traiter les troubles du sommeil chez les patients atteints du cancer. Plusieurs molécules et plantes sont étudiées afin de diminuer les effets secondaires des traitements du cancer (Hassan, 2019).

Parmi les molécules, on trouve les ginsénosides extrait de Ginseng et la quercétine.

Parmi les plantes ayant montré un effet protectif contre la radiothérapie, on cite :

  • Aegle marmelos (Orange-miel);

  • Aloe arborescens (Aloès arborescent) ;

  • Alstonia scholaris (Dita) ;

  • Biophytum sensitivum (Plante dormeuse) ;

  • Citrus sinensis (Oranger doux) ;

  • Emblica officinalis (Myrobolan emblique) ;

  • Grewia asiatica (Palisa) ;

  • Isatis indigotica (Genêt des teinturiers) ;

  • Mentha piperita (Menthe poivrée) et Mentha arvensis (Menthe des champs) ;

  • Olea europaea (Olivier d'Europe) ;

  • Panax ginseng (Ginseng) ;

  • Rosmarinus officinalis (Romarin) ;

  • Genre Rubus ;

  • Syzygium cumini (Jamblon) ;

  • Tinospora cordifolia (Guduchi) ;

  • Viscum album (Gui du sapin) ;

  • Xylopia aethiopica (Poivre de Guinée ou Kili).

5. Prévention du cancer par les plantes

Les plantes médicinales et leurs composés jouent un rôle important dans l’arrêt, le retardement et le contrôle de l'incidence et de la progression du cancer (George et al., 2021).

Plusieurs composés ont aussi montré leur effet chimiopréventif, tel que la curcumine, le resvératrol, l’apigénine, le gallate d'épigallocatéchine et la génistéine.

Plusieurs plantes sont étudiées pour leur rôle thérapeutique dans la prévention du cancer, comme :

  • Phyllanthus emblica (Groseiller de Ceylan) contre le cancer du sein ;

  • Allium sativum (Ail blanc) contre le cancer de l'œsophage et le cancer colorectal ;

  • Tinospora cordifolia (Guduchi) contre le cancer du col de l'utérus ;

  • Andrographis paniculata (Chirette verte) contre le cancer du côlon, du sein et la leucémie ;

  • Annona atemoya (Atemoya) contre le cancer du poumon, du côlon et du sein ;

  • Phyllanthus amarus (Grebb anba fèy blan) contre le cancer du poumon ;

  • Mappia foetida (Mappia ou arbre à savon) contre la leucémie, le lymphome et le cancer du col de l'utérus ;

  • Withania somnifera (Ginseng indien) et Cedrus deodara (cèdre de l'Himalaya) contre la leucémie ;

  • Rosa roxburghii (Rosier châtaigne) contre le cancer œsophagien, gastrique et pulmonaire ;

  • Glochidion zeylanicum (Bois de palissandre) contre le cancer de la prostate, du foie et du colon.

Importance de la nutrition (George et al., 2021)

Plusieurs études montrent aussi l’importance de la consommation régulière de fruits et de légumes afin de réduire la possibilité d'incidence de nombreux cancers. Ces derniers sont composés de plusieurs molécules (composés phénoliques comme les flavonoïdes et les acides phénoliques) ayant des activités antioxydantes et antitumorales permettant de contrôler la prolifération du cancer.

D’un autre côté, un régime alimentaire riche en chlorophylle (épinards, brocoli, roquette) contribue à la lutte contre les carcinogènes et les mutagènes alimentaires.

Alimentation pour se protéger du cancer
Alimentation pour se protéger du cancer
Alimentation pour se protéger du cancer
Alimentation pour se protéger du cancer

6. Challenges liés au traitement par les plantes

Le développement de médicaments anticancéreux à partir des plantes trouve quelques limites (Garcia-Oliveira et al., 2021) :

  • Faible solubilité aqueuse ;

  • Faible pénétration dans les cellules ciblées ;

  • Absorption par les cellules normales saines ;

  • Potentiel thérapeutique limité ;

  • Effets secondaires toxiques.

Parmi les solutions proposées pour résoudre ses challenges (Garcia-Oliveira et al., 2021) :

  • Les formulations à base de lipides (telles que la microencapsulation, les liposomes, les nano-émulsions, etc.) et la nanotechnologie sont utilisées pour améliorer la solubilité aqueuse, la stabilité, cibler spécifiquement les cellules cancéreuses et même réduire la quantité du composé phytochimique afin d'atteindre des niveaux thérapeutiques sûrs.

  • La combinaison des composés d’origine végétale avec des chimiothérapies conventionnelles peut améliorer le traitement. L’interaction entre plantes et chimiothérapie permettra d’avoir un effet de synergie, augmentant la toxicité dans les cellules cancéreuses et réduisant les doses thérapeutiques et les problèmes de toxicité. Par exemple, la curcumine est utilisée comme agent chimiosensibilisant, augmentant la sensibilisation des cellules cancéreuses aux médicaments. Plusieurs composés ont été utilisés dans des essais, comme l'apigénine, l'acide bétulinique et la berbérine.

En conclusion, les plantes jouent un rôle important dans la prévention et le traitement du cancer. Cependant, il est important de consulter un professionnel de santé avant d’entamer toute phytothérapie.

Sources :

Article de synthèse : Emadi, S. A., Rahbardar, M. G., Mehri, S., & Hosseinzadeh, H. (2022). A review of therapeutic potentials of milk thistle (Silybum marianum L.) and its main constituent, silymarin, on cancer, and their related patents. Iranian journal of basic medical sciences, 25(10), 1166-1176.

Article de synthèse : Garcia-Oliveira, P., Otero, P., Pereira, A. G., Chamorro, F., Carpena, M., Echave, J., Fraga-Corral, M. Simal-Gandara, J. & Prieto, M.A. (2021). Status and challenges of plant-anticancer compounds in cancer treatment. Pharmaceuticals, 14(2), 1–28.

Article de synthèse : George, B.P., Chandran, R. & Abrahamse, H. (2021). Role of Phytochemicals in Cancer Chemoprevention: Insights. Antioxidants, 10, 1455.

Chapitre de livre : Hassan Bassam (2019). Plants and cancer treatment, pages 1-11. Bassam A. R. H. (Ed.). Medicinal Plants - Use in Prevention and Treatment of Diseases, DOI 10.5772/intechopen.83104

Article de synthèse : Huang, M., Lu, J. J. & Ding, J. (2021). Natural Products in Cancer Therapy: Past, Present and Future. Natural Products and Bioprospecting, 11(1), 5–13.

Article de synthèse : Kim, S., Kim, N., Jeong, J., Lee, S., Kim, W., Ko, S. G. & Kim, B. (2021). Anti-cancer effect of Panax ginseng and its metabolites: from traditional medicine to modern drug discovery. Processes, 9(8), 1344.

Article de synthèse : Singh, N., Sahjlan, P. & Yadav, S. S. (2024). Phytochemistry and anticancer therapeutics of Camellia sinensis (Green tea). Pharmacological Research-Modern Chinese Medicine, 12, 100484.

Article de synthèse : Sultana, S., Munir, N., Mahmood, Z., Riaz, M., Akram, M., Rebezov, M., Kuderinova N., Moldabayeva Z., Shariati M.A., Rauf A. & Rengasamy, K. R. (2021). Molecular targets for the management of cancer using Curcuma longa Linn. phytoconstituents: A Review. Biomedicine & Pharmacotherapy, 135, 111078.

Source images :

Livre : Ben-Erik van Wyk & Michael Wink (2017). Medicinal Plants of the World. CABI, Second Edition. ISBN 978-1-78639-981-6